Udama chez ces gens-là

Zelba – Ed. La Boîte à bulles

Claire et Hervé sont parisiens et habitent un appartement cossu, au pied de la Tour Eiffel. Ensemble, ils viennent d’avoir une petite fille, Rose, mais pour Claire, pas question de délaisser sa carrière : il faut engager au plus vite une nounou.

Udama, elle, est malienne. Elle vit en périphérie de la capitale, dans une mansarde minuscule et insalubre, avec sa cousine et ses enfants. Répondant à leur annonce, la jeune femme sonne à la porte de Claire et Hervé. C’est elle qui s’occupera de Rose, quitte à tout accepter et à négliger ses propres enfants. Car Claire, accaparée par son travail, rentre en retard et laisse à peine à Udama le temps de vivre. Tandis que ni l’une ni l’autre ne trouvent le temps de souffler, Hervé, de son côté, souffre cruellement du mal-être et de la distance de sa femme.

En la personne d’Udama, Hervé recherche le réconfort qui lui manque et c’est alors que le couple et la jeune femme se retrouvent pris dans une spirale qui changera la donne.

Une BD à lecture multiple. Les sujets abordés, au-delà de l’histoire du couple, sont résolument contemporains. Traités avec beaucoup de sensibilité, de pudeur, sans jamais tomber dans la facilité, ils nous plongent dans une réalité sociale qu’il faut avoir le courage d’évoquer. Avec ce constat que le curseur entre bien et mal, profit et abus, n’est jamais aussi simple qu’on le crois. Chacun finalement se débat avec ses propres démons ! Un album superbement réalisé…

Rencontre avec Zelba, autrice stéphanoise :

Un nouvel album est toujours un événement. Comment vas-tu ?

Je suis très contente que l’album soit enfin sorti. La réalisation d’une BD est toujours une longue retraite qu’on passe enfermé dans son bureau, des mois dans la lueur de la table lumineuse, les mois suivants les yeux rivés sur un écran pour la mise en couleurs et la mise en place des textes dans les bulles. Puis, les différentes phases de corrections. Quand j’ai enfin pu tenir en main ce livre, j’ai senti un grand soulagement. Ça y est ! Il est là ! ça devient enfin concret ! Je peux le défendre, parcourir la France de festival en festival, rencontrer de vraies personnes, échanger ! Je suis actuellement dans cette phase, tout en ayant commencé à travailler sur de nouveaux projets et à me préparer pour la prochaine retraite.

Qu’est-ce qui t’a inspiré cette BD ?

Il y a quelques années, j’ai entendu un reportage dans « L’Afrique enchantée  » sur France Inter qui parlait de nounous africaines à Paris. Leurs conditions de travail dures, mais aussi les relations dépourvues de solidarité qu’elles entretiennent entre elles, voire un racisme plus que sous-jacent entre les nounous venant de pays différents. J’avais immédiatement envie d’en faire quelque chose. J’ai alors imaginé ce couple qui bat de l’aile après l’arrivée du premier bébé qui embauche une jeune Malienne comme nounou. Mais l’idée était de ne pas tomber dans les clichés tout faits et de raconter une histoire de méchants patrons qui exploitent une gentille nounou. La vie est plus riche et plus compliquée que ça…

Faut-il y voir une chronique de nos vies trépidantes ?

Nos vies trépidantes, oui… Je n’aborde en réalité pas un seul sujet dans ce livre. Comme Udama n’est pas le seul personnage principal. Chacun vit avec ses démons et doit faire en sorte de défendre ses intérêts. J’ai essayé de ne pas porter de jugement sur mes personnages, mais de les comprendre et de les rendre le plus humains possible avec leurs failles et défauts. Le reste appartient au lecteur.

Tu fais un peu de promos à Sainté. Ou va-t-on te trouver ?

J’ai déjà eu une séance de dédicace à l’Étrange RDV. Le 13 mai, je serai à la librairie de Paris. Et j’espère aussi participer à la Fête du Livre en octobre. Entre-temps, je parcours pas mal la France en long et en large. Jusqu’à ce que j’ai de nouveau envie de m’enfermer dans mon bureau…