Éric Chouvier n’est pas un supporter de l’ASSE comme les autres. Il a traversé l’Europe entière pour suivre le club de sa vie, et parfois même des océans… Il a rencontré un nombre incroyable de joueurs, de Platini à Alex, en passant par Lubomir Moravcik qui en écrit la préface, voici 50 ans de « L’épopée d’un supporter des Verts » aux Éditions des Joyeux Pendus.

  • Salut Éric ! Cela fait environ 30 ans que tu ne loupes aucun match de l’ASSE. Pour ceux qui ne te connaissent pas encore ou n’ont pas lu le livre, comment es-tu tombé dans la marmite ou plutôt le Chaudron Vert ?

Il n’y a aucune explication rationnelle dans la mesure où personne dans ma famille ou mon entourage ne pratiquait ni ne suivait le football, Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu avec moi un ballon et adoré l’AS Saint-Etienne qui était au crépuscule de sa gloire mais avait pour meneur de jeu Michel Platini. J’écoutais religieusement le multiplex radio et je suis tombé sous le charme du Chaudron dès que j’ai eu l’occasion d’en franchir les portes.

  • À la lecture du livre, avec tous ces déplacements incroyables, on se dit que tu dors peu et que tu y mets beaucoup d’argent : pourquoi l’ASSE est-elle à ce point importante pour toi ?

Comme Obélix, je suis tombé tout petit dans un chaudron magique et cela a changé le cours de ma vie. Je l’organise en fonction des matches des Verts qui sont mon moteur et mon baromètre. « Celui qui se perd dans sa passion perd moins que celui qui perd sa passion » disait Saint-Augustin. La mienne est peut-être déraisonnable mais inébranlable.

  • N’as-tu jamais eu peur ? En Moldavie tu es avec des passeurs, c’est chaud quand même… non ? En Israël aussi, l’ambiance était fraîche apparemment…

S’aventurer seul dans certains pays frôle l’inconscience mais ce n’est qu’avec le recul que je me suis rendu compte que j’ai parfois pris des risques inconsidérés : en ayant recours à un « passeur » pour aller de Roumanie en Moldavie, en étant abordé par le représentant d’un groupe ultranationaliste en Israël, en ayant maille à partir avec la police en Grèce où quelques années auparavant j’ai vu un supporter poignardé ou en étant obligé de signaler au gouvernement français ma présence en tant que ressortissant en transit sur le territoire ukrainien quelque temps avant la guerre…

  • Tu as aussi rencontré énormément de joueurs. De toutes ces rencontres laquelle est la plus belle ? Moravcik, ton idole ? Il y en a-t-il d’autres ?

En dehors des matches, je me déplace beaucoup à la rencontre d’anciens Verts de la part desquels je reçois à chaque fois un chaleureux accueil. J’ai par exemple été récemment reçu chez Jean-François Larios et Christophe Deguerville. Sans conteste, la rencontre la plus marquante a en effet été celle avec Lubomir Moravcik. Je suis parti en Slovaquie sur les traces de mon idole et par un incroyable concours de circonstances j’ai reçu un coup de fil de sa part à peine arrivé à Nitra, sa ville natale. Il m’a donné rendez-vous puis m’a embarqué sur son scooter pour me montrer le stade où il a débuté. Nous sommes depuis devenus amis et il m’a fait le grand honneur de signer la préface de mon ouvrage.

  • Avec Michel Platini c’est également assez folklorique ! Prendre des risques paye parfois !

Michel Platini est à mes yeux le plus grand joueur de l’histoire du football français. Je l’admire depuis tout petit et j’ai développé des trésors d’ingéniosité pour le rencontrer. Je suis allé jusqu’à subtiliser une accréditation pour assister à un conseil fédéral auquel je n’étais bien sûr pas invité. Je l’ai attendu durant des heures devant un hôtel ou un restaurant, j’ai fait plusieurs fois la queue lors d’une séance de dédicaces et j’ai traversé la France pour le voir donner le coup d’envoi d’un match du Variétés Club de France. Je conserve précieusement la lettre qu’il m’a adressée pour me remercier de mon soutien lorsqu’il a traversé une passe délicate.

  • Comme tu le dis dans le livre tu es chez les Green Angels, mais tu ne partages pas toujours les valeurs ultras : comment vois-tu l’évolution du supportérisme stéphanois mais aussi français, ultra ou non ?

L’AS Saint-Etienne est reconnue pour la fidélité et la ferveur de ses supporters qui insufflent à l’équipe un supplément d’âme et sont les garants des valeurs ancestrales. La volonté des instances d’avoir des stades aseptisés n’est pas compatible avec le mode de supportérisme local et en particulier la culture ultra. À titre personnel, je trouve inadmissible que des sanctions collectives soient prises en réponse à des actes commis par une minorité.

  • On a évoqué les souvenirs de rencontres : mais sur le terrain, quel est ton plus beau match vécu ?

Même s’il ne s’agissait que d’oppositions amicales, voir les Verts damer le pion au Milan AC et au FC Barcelone m’a empli de fierté. Pour répondre de manière précise à la question, le plus beau match de ma vie de supporter a été le 5-1 infligé à l’OM en 1999 grâce à un quadruplé d’Alex mais le plus important a été la victoire en finale de la Coupe de la Ligue 2013 face au Stade Rennais.

  • Tu es aussi collectionneur, du coup quelle est la plus belle pièce de ta collection ?

Je suis en effet un collectionneur invétéré au point d’avoir constitué chez moi un musée. Il est très difficile de ressortir une pièce en particulier mais, puisque je dois choisir, je dirais les maillots qui m’ont été offerts par « Lubo » Moravcik et Alex.

  • Reste l’actu : comment vois-tu la fin de saison et le retour de Cardona ? On va se maintenir tu penses ?

Le retour en Ligue 1 est bien plus compliqué que je ne le pensais avec plusieurs corrections administrées en déplacement, une différence de buts de ce fait catastrophique et une position peu enviable au classement. Un entraîneur étranger est arrivé avec une nouvelle philosophie de jeu qui séduit les observateurs. Le fait qu’Irvin Cardona soit revenu dans le Forez est évidemment une bonne chose tant il s’est montré décisif la saison dernière. D’autres recrues sont attendues pour mener à bien l’opération maintien auquel je crois dur comme fer. Il est pour moi inconcevable que l’ASSE redescende en Ligue 2.

Livre L’Épopée d’un supporter des Verts – disponible en librairies stéphanoises ou sur le site des éditions des Joyeux Pendus : https://leseditionsdujoyeuxpendu.com/ouvrages/lepopee-dun-supporter-des-verts/