Je l’avoue, j’ai toujours eu une forme d’a priori négatif envers tous les fils de… Que ce soit dans le domaine politique, économique ou artistique, lorsqu’ils suivent les pas de leurs géniteurs, les fils de… sont, légitimement il me semble, suspectés de favoritisme ou de bénéficier des réseaux tissés par leurs parents. Et si l’on regarde la trajectoire des fils Dassault, Lagardère, Arnault, Delon, Belmondo, Picasso ou Debré, on ne peut pas dire que ces héritiers ont su faire preuve du même talent que leurs aînés. Il en va ainsi de nos sociétés qui n’ont jamais cessé de primer l’origine et l’ascendance, il faut bien l’admettre. À toutes règles, ses exceptions. Et s’il fallait citer un seul contre exemple à cette malédiction (qui au fond n’en est pas une pour les concernés, faut pas exagérer non plus !) ce serait bien évidemment celui de Matthieu Chédid, alias M. Héritier d’une lignée d’artistes d’origine égyptienne, sa grand-mère Andrée Chédid est une poète reconnue à travers le monde, Matthieu Chédid a longtemps porté cet héritage familial comme un poids sans doute trop lourd.
C’est pourquoi il lui faudra attendre la trentaine et une longue expérience de musicien de studio, (M. Chédid aura accompagné (sur scène ou en studio) une bonne partie de la chanson Française jusqu’à la fin des années 90) pour accéder à son tour à la notoriété. Ce sera grâce à son second album, « Je dis aime », qui se vendra comme des petits pains (plus de 500 000 exemplaires !). Sa tournée, qui suit la sortie de l’album, se joue à guichets fermés et le musicien remportera cette année 2000, les Victoires de l’artiste interprète de l’année et du concert de l’année. Derrière le personnage de M, son double scénique, M. Chédid peut laisser libre court à son imagination débridée et parvient à prendre le dessus sur une timidité maladive. À l’image de Ziggy Sardust, M. occupe l’espace et une temporalité que Matthieu Chédid ne peut assumer seul (au moins à ses débuts).
Sorti à la fin à l’automne dernier, « Il » est donc le sixième album studio de M. Sa réalisation a été assurée par le duo franco californien Dorion Fiszel et Brad Thomas, entre Los Angeles et Paris et pendant près de 9 mois. Le titre phare de l’album « Mojo », livré en avant-première sur tous les réseaux sociaux, témoigne de la volonté de M. d’assumer une forme de retour aux sources, avec des compositions plus énergiques et plus rock. Les titres de l’album mettent en avant sa volonté de lâcher prise, à tous les niveaux, d’aller vers des jeux de mots et des phrases simples, autour de chansons taillées pour la scène, énergiques et parfois novatrices. On notera des chansons en forme d’hommage, « L’île intense » illustrant sa passion pour l’île de la Réunion, « La maison de Saraï », comme un clin d’œil à la maison du Bonheur de Saraï Fiszel (la sœur de Dorion, voir plus haut…) où séjournèrent Jimi Hendrix et les Beatles, et « Océan », un adieu à DJ Mehdi, un ami proche, disparu quelque temps avant l’enregistrement de l’album… C’est clair, Andrée et Louis peuvent être fiers de Matthieu.
Festival Paroles et Musique – Zénith de Saint-Étienne Mercredi 29 mai à 20 h 30