Le jean, plus encore que le Steton, fameux chapeau texan, ou les santiags, dont l’origine se retrouve du côté du Mexique, reste le vêtement dont l’image est définitivement collée à l’histoire des Etats-Unis. Il aura fallu que Levi Strauss, émigré bavarois fraîchement installé à San Francisco qui œuvrait dans le commerce du textile pendant la Conquête du Grand Ouest américain (fin 19ième siècle), rencontre le tailleur Jacob Davis et crée avec lui, le 20 mai 1873, le premier pantalon de l’histoire, bénéficiant du procédé breveté des célèbres rivets. Pourtant, ce sera une entreprise française, créée au milieu des années 60 par Marithé Bachellerie et François Girbaud, qui imposera le jean comme le vêtement symbole de la fin du 20ième siècle.

Ce sont bien eux, Marithé, la lyonnaise et François Girbaud, le Mazamétain, qui permettront au jean, au gré d’incessantes recherches technologiques, de coller au mieux avec son époque, sa culture et son image. Au début des années 70, les deux créateurs parviennent à industrialiser le délavage du jean par l’utilisation mécanique de pierres ponces et donnent naissance au Stone Wash. Dans la foulée, Marithé et François Girbaud démocratisent l’utilisation des fibres élastomères dans les denims qui deviennent, comme par magie, Strech. Ce sont eux encore qui, à la fin des années 70, parviennent à capter l’esprit d’une culture naissante, le Hip Hop, et à créer une nouvelle mode, le jean Baggy, porté aujourd’hui dans tous les ghettos nord-américains. En 1980, ils inventent la X pocket, poche avant du jean à ouverture oblique qui remplace les séculaires poches cavalières à ouverture incurvée. Au début des années 2000, Marithé et François Girbaud imaginent un pied de nez à leur propre histoire avec le procédé du « Blue Eternal », un procédé qui permet de rendre un jean indélavable, comme pour boucler la boucle du Stone Wash. Plus récemment encore, ils créent le Wattwash (en 2003), une technique d’utilisation du laser pour simuler les effets d’usure et de délavage renvoyant le Stone Wash à l’âge de pierre et collant parfaitement à une certaine idée du développement durable.

Nonobstant les modes, la mondialisation ou les tendances, Marithé et François Girbaud ont su imposer leurs propres codes et créer leurs propres modes : ils ont fait de leur parcours une aventure industrielle et culturelle unique, toujours sans équivalent. Sur 700 m2,  cette exposition nous fera découvrir l’univers foisonnant de la marque à travers les vêtements cultes directement issus des archives de la maison, des dessins techniques et croquis d’humeur. Nous pourrons y voir aussi les campagnes de communication autour du jean qui n’ont rien à envier à celles d’un autre industriel italien de la maille,  dont celle aujourd’hui intitulée « La Cène » et qui vaudra au couple et à son concepteur Jean-Luc Godard les foudres de la bienséance. Une autre façon d’envisager le jean, en effet…

Musée d’Art et d’Industrie – Saint-Etienne
A partir du 26 octobre, jusqu’au 6 mai