Invité dans l’émission de France 5 « C’est à vous » afin d’évoquer son retour sur scène, Laurent Gerra était convié à déguster la cuisine aux accents transalpins de Louana Belmondo. Au moment où l’humoriste goûtait un vin rouge, l’animatrice Anne-Sophie Lapix sondait le natif de l’Ain sur le doux breuvage qu’il découvrait. On vit alors Laurent Gerra réaliser un numéro d’équilibriste entre l’obligation de faire bonne figure, il était après tout en direct à la télé, et sa volonté de ne froisser personne bien qu’il ne semblât pas apprécier ce foutu vin, il grimaçait effectivement… « C’est un vin bio, non » lâcha-t-il au fond comme pour excuser son âpreté ou son manque de rondeur, sans doute… « C’est votre vin, c’est vous qui êtes le producteur de ce vin » répondait l’ex-animatrice de Canal + qui avait rapidement saisi le malaise de la situation…Il s’agissait d’un Moulin à Vent, l’une des 13 appellations du Beaujolais…Par ailleurs, l’humoriste est également propriétaire de vignes de Pouilly-Fuissé et de Côtes de Provence.

Ce petit imprévu télévisuel montre néanmoins la difficulté de la surexposition médiatique et nous rappelle que « trop de communication, tue la communication ». Cela devrait également nous interroger sur l’utilité de toutes ces émissions télé qui flirtent entre le cirage de pompe et l’information. Pourtant, la télé, Laurent Gerra la connaît mieux que personne, de ses débuts aux côtés de Jacques Martin jusqu’à sa participation hebdomadaire auprès de l’incontournable Michel Drucker. D’ailleurs, il s’en moque aussi beaucoup de la télé, dans ce nouveau spectacle qui rend hommage à toute la magie du Music-Hall, car au fond, le music-hall reste la grande affaire de l’humoriste lyonnais. Et il ne lui fallait qu’une dernière chose pour réaliser son rêve d’enfant : un big-band. Chose faite avec le grand orchestre de Fred Manoukian et ses 19 musiciens qui accompagnent chaque soir L. Gerra. On dit parfois de Laurent Gerra qu’il est grivois mais la grivoiserie n’est pas donnée à tous. Il faut y pénétrer en claquant la porte doucement. Elle suppose quelque raffinement, de la méthode, il faut ouvrir l’oreille du spectateur avec délicatesse, la délicatesse du médecin qui vous purge le conduit auditif d’un bouchon. Voilà tout un art pas grossier, libérateur, subtil. L. Gerra, le malfaisant, nettoie les esprits obturés et décomplexe.

Entrée à l’américaine sous les cuivres, L. Gerra dans la peau d’Aznavour ouvre le bal sans vampire de ce spectacle « qui n’a reçu aucune subvention de l’État », pour cause… Suivent deux heures non-stop d’imitations et de bonne humeur. Les fidèles modèles politiques de l’imitateur défilent : Jack Lang, Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac, sans oublier les classiques, Céline Dion, Francis Cabrel, Étienne Daho, Jeanne Moreau, Alain Delon, Fabrice Luchini. Chroniqueur des pestes de nos temps modernes, L. Gerra ne fait pas dans la nostalgie : il donne allègrement dans la générosité et ne manque jamais de rendre hommage à ses légendes : Léo Ferré, Charles Trenet, Yves Montand, Serge Reggiani, Henri Salvador, Georges Brassens, Gilbert Bécaud, Claude Nougaro ou encore Serge Gainsbourg. C’est vrai, il est sans pitié avec la nouvelle génération de chanteurs, les Delerm, Biolay, Bénabar et les autres… Mais n’est-ce pas le rôle de tout bon humoriste de s’en prendre aux plus vivants… ?

Zénith de Saint-Etienne – Jeudi 14 novembre à 20 h 30