Avant de quitter la Manufacture pour un nouveau lieu encore tenu secret, le Festival Positive Education revient cette année avec une programmation plus riche que jamais. Si vous n’avez jamais goûté à cette ambiance si particulière à la nuit tombée, où, en déambulant de salle en salle, vous découvrez différents artistes, chacun avec son univers singulier, et à chaque fois avec une nouvelle ambiance, un son différent, une atmosphère unique, alors c’est le moment ou jamais. Un festival où la créativité, la musique, l’expérience même de la scène sont réinventées. Rencontre avec Charles Di Falco qui nous en dit plus !!!

Même si le festival est aujourd’hui connu partout en Europe et plus loin, certain-e-s se demandent encore son origine et ce qui vous a conduit, toi et tes partenaires, à vous lancer ?

C’était en mars 2015, au cours d’une soirée particulièrement passionnante à Saint-Étienne, où de nombreux événements ont eu lieu le même soir. Nous avons pris un verre en fin de soirée avec amis, partenaires, ainsi qu’avec la tête d’affiche de la soirée. Au fil des discussions, l’idée d’organiser un festival à Saint-Étienne est alors apparue comme une évidence. Entre la diversité culturelle et la conscience collective d’une ville industrielle, Saint-Étienne est un superbe terrain de jeu pour un festival : le nombre d’associations alternatives, comparativement à la taille de la ville et au nombre de ses habitants, y est particulièrement important. Quelques mois plus tard, on lançait l’édition 0 du Positive Education Festival (PEF) en octobre 2015. Nous imaginions de nouvelles choses, exigeantes et populaires, pour les habitantes et habitants de Saint-Étienne, pas spécialement pour le reste du monde. Or, c’est l’inverse qui s’est produit. On a d’abord eu les retours d’un public extérieur à la ville, venant de toute la France et d’Europe, avant de pouvoir conquérir le cœur des Stéphanois. Il est difficile au début d’un projet de transmettre son esprit. Nous avons choisi de l’organiser dans notre ville pour des raisons concrètes et nous ne le regrettons pas. Les données de la ville correspondent à l’esprit du festival : à la fois brut et doux, froid mais chaleureux, industriel et créatif, ces duos à l’apparence contradictoire qui suintent dans la ville sont à l’origine de nos motivations.

Vous attendiez-vous à un tel succès ?

Nous espérons toujours obtenir une certaine reconnaissance lorsque nous investissons beaucoup d’énergie et de cœur dans un projet, mais le résultat n’est pas toujours là. Aujourd’hui, atteindre un tel objectif avec une programmation sans compromis, cela représente plus qu’un rêve. Nous espérons faire une excellente édition 2022 pour atteindre de prochains buts en 2023, avec des choix artistiques encore plus forts. Notre plus grande satisfaction réside dans le fait que nous contribuions au rayonnement de la ville. Cette réussite doit enrichir le territoire et apporter de l’énergie, de la confiance. Nous avons rencontré de nombreuses difficultés, comme tous nos confrères, et ce n’est jamais gagné. Je pense qu’il serait plus juste de parler de réussite si nous réussissons cette prochaine édition.

L’électro est un genre assez éclectique, peut-on essayer de le définir pour les néophytes ?

L’électro est un genre de musique électronique : le Positive Education Festival programme de l’electro, mais aussi de la house, de la bass music, de la trance et de la techno. C’est un festival de musique électronique au sens large du terme. Cette musique s’est beaucoup développée depuis ses débuts et aujourd’hui, elle se glisse un peu partout. Pour schématiser, au départ de la musique électronique, il y avait des machines pour reproduire des lignes de basse, des boîtes à rythmes et des synthétiseurs. À travers ces outils, les artistes ont réinventé le rock : sont nés le post punk puis la wave. De l’autre côté de la planète, le disco, le funk ont également été réinventés par les artistes de musique électronique, puis est arrivé le hip-hop, et enfin l’électro, la house, la techno. Dans le milieu du dub, et même du jazz, c’est la même histoire : les artistes ont réinventé le rocksteady, le reggae, puis sont arrivés le courant jungle, dubstep, la bass music. C’est vulgarisé mais on n’est pas si loin de la réalité : la musique électronique s’inscrit bel et bien dans une histoire. Aujourd’hui, rares sont ceux qui restent fixés sur la musique originale des débuts de chaque courant, et internet facilite énormément les choses. Depuis quelques années maintenant, tout se mélange, tout s’influence : des rockeurs ont fait de la techno, des artistes techno ont fait du rock. On peut tous trouver quelque chose d’intéressant dans la musique électronique. C’est très vaste et ça demande de connaître ses préférences pour découvrir les courants qui nous correspondent (rester curieux et lire les bios des artistes est un exercice intéressant pour apprendre peu à peu ce qui nous plaît dans la musique électronique, quels sont les genres qui nous touchent et nous animent).

L’ancien site de la Manu est le lieu idéal pour une plongée dans cet univers. Cela dit, c’est la dernière année ?

Le Positive Education Festival a grandi avec la manufacture, nous sommes devenus plus matures au rythme de ses restaurations. Faire d’une ancienne manufacture d’armes un lieu de célébration et d’union, cela faisait totalement sens avec notre projet. Ce sera donc avec un petit pincement au cœur que nous quitterons ce site mais nous devrions pouvoir confirmer le prochain lieu dans un futur très proche, il correspond parfaitement à nos attentes et nous savons que notre public s’y reconnaîtra. La friche industrielle est facilement associable à la musique alternative, nous souhaitons garder un toit en phase avec ce qui fait l’âme du festival.

On ne peut pas citer tout le monde car il y a eu un grand nombre d’artistes invités, mais on peut sans doute en présenter quelques-un-e-s ?

En effet, plus de 400 artistes en 6 ans : on a connu beaucoup de moments forts ! J’aimerais citer le concert d’Africain Head Charge, dont les artistes produisent du dub très riche, teinté de sonorités électroniques. Certains titres sont même psychédéliques. Un des moments les plus forts de l’histoire du festival. On s’est d’ailleurs bien fait avoir sur la fréquentation de ce concert : on aurait dû choisir une plus grande salle, mais ce concert, au sol, avec tout le public serré autour d’eux, c’était la folie.

Dans un autre répertoire, je choisirais de parler du b2B d’Eris Drew & Octo Octa l’année dernière, car elles ont apporté une vague de chaleur dans le festival : on était comme dans un tunnel qui reliait les warehouses londoniens des années 90 aux clubs les plus cools de Chicago. Il s’agissait de nos premières têtes d’affiche radicalement House Music. Un moment de partage très fort.

J’ai encore plein de souvenirs marquants en tête, mais ce serait interminable !

Y a-t-il des nouveautés cette année ?

Tous les ans, le festival apporte son lot de nouveautés et d’engagements. Pour cette année, la dernière à la Cité du design dans le format qu’on lui connaît, nous avons misé sur l’exploitation presque totale des bâtiments H avec l’ouverture d’une nouvelle scène. Toutes les esthétiques du festival seront représentées avec au total 13 programmations singulières réparties sur 5 jours.

La première nouveauté est l’inauguration commune avec le festival Pléiades, festival des arts numériques, qui mérite un avenir conséquent dans le paysage culturel ligérien et au-delà. Nous nous sommes entretenus avec Raphaël Jourjon il y a 4 ans de cela. Nous avons échangé sur la pertinence d’avoir ces deux projets en même temps afin que le temps d’une semaine, Saint-Étienne brille de jour comme de nuit. Après plusieurs années de développement parallèle, nous organisons une inauguration commune, ce sera le mardi 8 novembre place Jean Jaurès, et c’est gratuit. Deux œuvres que nous avons choisies avec soin seront présentées pour allier arts numériques et live de musique électronique.

Petit clin d’œil à l’interview de 2019 pour l’Agenda stéphanois dans laquelle j’avais conclu par « Allez les Verts ! » : nous avons été contactés par l’ASSE dans le but de tisser un partenariat sport / musique. Nous avons créé un t-shirt collector et désigné nos ecocups avec l’ASSE. Un mix est prévu au stade le samedi 12 novembre en off surprise du festival, et bien d’autres choses sont à venir. Nous sommes énormément fiers de ce partenariat et on n’a pas fini d’en entendre parler !

Nous proposons également une table ronde dédiée aux femmes dans la musique électronique et plus largement dans la culture. Pour l’occasion, nous avons réuni des êtres d’exception qui depuis des années s’évertuent à faire évoluer leur art, participent à élever les consciences, créent des ponts et participent à déconstruire certains murs invisibles. C’est donc un grand honneur de réunir la réalisatrice et productrice indépendante Jacqueline Caux qu’on ne présente plus, Anaco, artiste et programmatrice de la Machine du célèbre Moulin Rouge à Paris, Flore, compositrice, dj et directrice de label, Mika Oki, productrice, dj et responsable de l’antenne de Lyl Radio à Bruxelles, et enfin Val, figure locale, artiste et responsable de Giddy Up, collectif agissant en faveur de la représentation et de la visibilisation des femmes dans la culture, avec en ligne de mire l’égalité des genres de manière générale. Le développement de l’accueil du public et la sensibilisation aux problèmes de comportement est une de nos priorités car il reste encore du chemin à parcourir quant au respect des êtres, des genres et des modes vestimentaires. C’est donc avec plaisir que Giddy Up agira dans la continuité de nos efforts pour une fête belle et safe. Nous avons par exemple depuis 2019 créé une régie spéciale « bien-être » composée de 20 personnes circulant en permanence sur le festival afin de répondre aux besoins des festivaliers. Un stand de prévention Giddy Up sera présent directement à l’entrée du festival. Un certain nombre de choses reviendront en 2023 comme des off spéciaux et la volonté de réinvestir le cœur de la ville.

Sur le côté pratico-pratique, comment ça marche ?

C’est très simple : il y a des pass 3 jours (jeudi, vendredi, samedi) et des pass 2 jours (vendredi, samedi), mais aussi des places à l’unité pour les personnes ne souhaitant faire qu’une soirée. L’inauguration place Jean Jaurès le mardi est gratuite, et l’avant-première du festival à la Cité du design, le mercredi, est gratuite également.

Bonne nouvelle : cette année le 11 novembre (jour férié) tombe un vendredi, de quoi profiter des 3 soirées du festival si on en a envie !

Un mot pour conclure ?

Dans ce climat mondial incertain, faire preuve de sang-froid mais surtout redoubler de bon sens et d’amour nous paraît essentiel. L’art et la culture sont de puissants alliés pour nous retrouver, et danser reste une des plus belles armes pour extérioriser. Venez danser avec nous et découvrir les genres qui vous toucheront dans la musique électronique !

Toutes les informations, la programmation et la billetterie se trouvent sur notre site internet www.positiveeducation.fr