Festival Paroles & Musiques

Organisé par une équipe de passionnés, voilà 32 ans que le festival Paroles & Musiques revient, année après année, avec une programmation dont chacun s’accorde à dire qu’elle est à la fois riche, originale, audacieuse, avec un savant équilibre entre la scène émergente qui reste son adn, et les têtes d’affiche dont on se régale d’avance de les (re)découvrir. Le festival doit son succès à ses choix artistiques, à ses engagements, notamment ces dernières années pour la place de la femme dans le monde de la musique, à sa volonté de mettre en lumière des jeunes talents, mais aussi à son ancrage plus que marqué sur notre territoire. C’est incontestablement un moment fort de la vie culturelle stéphanoise dont Simon Javelle présente les grandes lignes à travers cette rencontre.

À quelques semaines du festival, comment ça va ?

Ça va très très bien. Nous avons cette année un festival dont on est très fiers, avec un choix cohérent dans la programmation et particulièrement riche. Les réservations pour les concerts sont déjà très avancées, certains étant déjà complets. On est impatients que cela commence !

En quelques mots, quelles sont les spécificités du festival ?

Paroles & Musiques est un festival de chanson francophone depuis 32 ans. Nous n’avons jamais changé cette ligne artistique. Nous réaffirmons avec force notre volonté de laisser beaucoup de places aux découvertes, aux jeunes artistes, avec cette année 60 % de la programmation qui y est consacrée. Nous sommes également attentifs aux transformations du monde de la chanson. Il faut s’adapter constamment, et on le fait. On consacre également une large place aux groupes locaux. Cette année par exemple, on peut citer Brique Argent, qui a d’ailleurs remporté le prix du Printemps de Bourges, nous en sommes très fiers. C’est aussi un festival ancré sur son territoire, qui a évolué en fonction de la création des équipements culturels. La salle Jeanne d’Arc, puis le Fil, le Zénith, la Comète maintenant… Enfin et surtout, c’est un festival populaire. Nous avons fait des choix par le passé qui n’ont pas toujours fonctionné mais nous sommes vraiment très contents de la direction qu’a prise le festival.

Il y a eu des hauts et des bas sans doute, mais 32 ans tout de même. Ça t’inspire quoi ?

On est super fiers de cette longévité. Elle existe, grâce au soutien des collectivités déjà, au public toujours fidèle, mais aussi grâce à notre acharnement à maintenir ce festival. Nous nous remettons en question en permanence notamment sur le sens de tout ce qu’on entreprend. Nous essayons de garder l’esprit familial du festival. Nous suivons en permanence l’évolution de la chanson ou de la culture à Saint-Étienne. Mais rien n’est jamais acquit. Il faut rester humble et vigilant.

Le festival, comme tous les secteurs culturels, doit s’adapter aux différentes crises. Comment traversez-vous tout cela ?

La crise du Covid particulièrement est arrivée à un moment où nous étions déjà en crise avec l’échec financier du festival au musée de la Mine. Ça nous a permis, finalement, de prendre du recul, ce qui a été salutaire. On a pu se poser les bonnes questions et se projeter sur les prochaines années. Il fallait remettre l’accent notamment sur l’émergence, parce que c’est notre ADN mais aussi parce que ces jeunes artistes ont besoin, surtout en ce moment, d’être mis en lumière. Nous avons aussi réfléchi à la place des femmes dans la musique, comme beaucoup d’autres festivals, en poussant vers la parité, etc. Donc le Covid n’a pas eu qu’un impact négatif en ce sens-là. Mais bien sûr, entre reports, annulations etc., cette période a aussi été très compliquée. L’année dernière, même si tout n’a pas été parfait, notre festival a très bien marché. Par contre, on sent cette année qu’il se passe vraiment quelque chose. On sent que le public a compris où nous voulions en venir et adhère à notre démarche, à notre programmation et à ce que nous faisons autour du festival.

La remise en question passe aussi par une équipe qui se renouvelle, avec notamment l’arrivée de David Rivaton à la programmation.

Je ressentais ce besoin d’être entouré sur la programmation. Rappelons qu’au tout début dans les années 90 elle était faite Marc Javelle, ensuite Marc et moi, puis seulement par moi. Je sentais qu’elle avait besoin d’avoir un nouvel élan et David Rivaton était tout désigné pour nous aider à faire cela. Il a commencé l’année dernière et cette année il a pris beaucoup plus de place encore. Et j’en suis super content. Humainement et artistiquement, on s’entend très très bien. Nous avons aussi la même façon de travailler sur Paroles & Musiques. Enfin, c’est important de le dire, David est quelqu’un de très compétent. Il a compris notre feuille de route à merveille et a su y imposer sa patte. C’est important aussi qu’il soit sur le territoire, qu’il connaisse le public, l’esprit stéphanois. Cela dit, il n’est pas le seul à avoir rejoint l’équipe. Nous avons aussi de nouvelles personnes à la communication, l’action culturelle, la production, sans parler de ceux qui nous rejoignent sur le festival même. C’est pour nous un véritable enrichissement !

Tu disais que l’émergence était un peu l’ADN du festival. Est-ce qu’on peut en parler un peu ?

Déjà je tiens à dire que nous n’avons jamais laissé de côté cet aspect du festival. Certaines années nous avons eu beaucoup de têtes d’affiche, ce qui pourrait laisser penser que nous avons négligé l’émergence, ce qui n’est évidemment pas le cas. Cette année par contre on a tenu à le réaffirmer. La nouvelle génération se retrouvera à l’Usine avec Lisa Ducasse, Ysé, Leïla Huissoud, Bonneville et Coline Rio. Une nouvelle scène très créative et prometteuse. Il y a aussi Zaho de Sagazan, extraordinaire, que nous avions repéré et qui explose maintenant un peu partout. Cette programmation découverte est ultra riche et très originale. On peut citer aussi The Doug ou Claude qui amènent une pointe d’humour et qui ne se prennent pas forcément toujours au sérieux. Ça fait vraiment du bien de les écouter. Rappelons enfin la programmation de Paroles de Zinc que l’on peaufine encore mais il y aura quelques pépites locales à découvrir.

Parlons des têtes d’affiche. Il y a du beau monde également ?

Je pourrais dire un mot sur chacun d’eux mais pour faire simple, ce sont des artistes qui nous touchent particulièrement. Bertand Belin, par exemple, a une longue histoire avec le festival. Il est revenu de nombreuses fois accompagner d’autres artistes et là il remplit la Comète. M, Matthieu Chedid, qui a aussi une belle histoire avec le festival était venu en 2019 à la salle Jeanne d’Arc pour nous aider. Il nous a redonné la foi et l’envie de continuer. Merci encore à lui. On va retrouver Faada Freddy, Charlie Winston, Dominique A, un fidèle lui aussi du festival. Suzane, Lou Mugget, Brique Argent… Un super plateau avec Riopy et November Ultra, qui devrait surprendre les gens. Un autre beau moment à découvrir pour clôturer le festival avec Terrenoire pour les Escapades en bord de Loire. Je trouve vraiment que cette année tout est hyper cohérent et très riche. Il y en a vraiment pour tous les goûts et tous les publics.

On peut d’ailleurs dire deux mots sur ces Escapades ?

On cherchait une forme originale pour clôturer le festival qui se passe sur le week-end de Pentecôte, toujours en prenant en compte le territoire. L’idée est de proposer aux spectateurs de faire une petite balade en bateau dans les Gorges de la Loire, puis on va les amener sur la presqu’île du Chatelet, dans la petite chapelle, où leur sera proposée une lecture musicale par le groupe Terrenoire. Nous avons tout de suite pensé à Raphaël et Théo pour faire ça. Ce sera une vraie création. C’est la petite cerise sur le gâteau de la programmation de terminer de cette façon-là.

Le festival s’est associé avec Giddy Up, afin de sensibiliser à la question d’égalité des genres dans la musique avec Paroles de Femmes. De quoi s’agit-il ?

On a toujours été attentifs à ces questions-là. Nous avions par exemple fait des ateliers d’écritures pendant plusieurs années en maison d’arrêt, avec des têtes d’affiche qui se déplaçaient et jouaient dans ces lieux, on a même sorti des livres là-dessus… Là l’idée c’était d’essayer de donner de la visibilité aux femmes dans le milieu des musiques actuelles. Ça passe déjà par une programmation la plus égalitaire possible mais on tenait aussi à ce qu’il y ait plus d’actions. Il y a les ateliers d’écritures créatives, avec la sortie d’un fanzine et l’enregistrement des textes écrits par ces femmes. Cette année ces ateliers se déroulent à La Cale, l’espace socioculturel de l’Amicale laïque du Crêt de Roch. Le dernier atelier étant consacré à la forme « scénique » des textes. Le rendu se passera le jeudi 25 mai à la Cale, dans le cadre de Paroles de Zinc, où les textes vont être dits sur scène par celles qui les ont écrits, et mis en musique. Sur le festival, il y aura aussi des actions de prévention et de sensibilisation des violences sexistes et sexuelles, des ateliers d’initiations au Djing (pratique du mix musical créatif (n.d.l.r)), un « espace bienveillant » pour notamment accueillir les personnes exposées à des comportements violents, qui ont besoin d’écoute etc. Voilà, on essaye vraiment de faire le maximum pendant et autour du festival sur ces questions-là.

Pour finir quelques infos pratiques. Lieux, tarifs ?

Sur les lieux, déjà, il y a la Comète avec l’Usine, qui est le centre névralgique du festival pour l’émergence avec 8 découvertes qui s’y produiront avec des concerts d’environ 50 minutes à 18 h 30 et 23 h. Le Panassa, toujours à la Comète, pour les têtes d’affiche avec à chaque fois une première partie un-e artiste émergent-e, on sera au Fil, au Zénith, et dans tous les bars partenaires de Paroles de Zinc. Et en point d’orgue à Saint-Victor à la presqu’île du Chatelet. Concernant les tarifs, c’est assez simple. Cela va du gratuit pour Paroles de Zinc, pour certaines soirées à l’Usine, avec priorité pour ceux qui ont le Pass, 5 euros pour les concerts découvertes à l’Usine à 18 h 30. Pour le reste, on essaye de rester au plus juste en tenant compte des coûts qui ont vraiment augmenté, entre l’inflation, les cachets des artistes, les coûts techniques etc. Il y a les tarifs solidaires à -50 % pour les demandeurs d’emploi, les bénéficiaires du RSA, etc. Il y a des places à 15 euros sur la soirée du samedi, des places à 5 euros pour les étudiants, sans parler de Sainté Pass, du pass culture, etc. C’est toujours trop cher, mais on essaye vraiment de faire que ce soit le plus accessible possible.

Un mot pour conclure ?

Cette année, il se passe quelque chose, je l’ai dit, et franchement ça fait du bien. Ça valide nos choix, et tout ce que nous avons entrepris. On va maintenant essayer de donner le meilleur de nous-même pour que le festival, son contenu artistique et culturel, soit une réussite.