Il y a quelques jours Donald Trump a fêté ses 100 premiers jours à la Maison Blanche. Il est de coutume de dire que les 100 premiers jours sont cruciaux dans l’exercice du pouvoir présidentiel. Et que si durant ces 100 premiers jours rien n’est fait en termes de décision, alors le mandat qui suivra sera à l’image de ces 100 premiers jours. Et eu égard à notre propre situation, nous venons de connaître en France avec l’élection d’un tout nouveau président de la République (ou nouvelle présidente car au moment de la rédaction de cet article, nous ignorons encore l’issu du vote du peuple de France…), ces 100 premiers jours de la présidence de D. Trump pourraient éclairer quelque peu nos lanternes et esquisser ce qui se fera ou ne se fera pas en France. En effet et tout au moins jusqu’à présent, le dénominateur commun de la plupart des candidats à l’élection suprême (de quelque pays que ce soit), réside dans leur incapacité chronique à tenir leurs promesses de campagne. Les candidats font-ils trop de promesses ou ces promesses sont-elles à ce point nécessaires pour obliger les électeurs à voter ? Ceci est encore un autre débat…

Le moins que l’on puisse dire concernant D. Trump, c’est que pour l’instant le ramage n’a pas été à la hauteur du plumage… Il faut bien avouer que notre corbeau, en l’occurrence, avait fait fort et annoncé mille changements radicaux. Le 45e président des États-Unis, dont l’élection surprise face à Hillary Clinton avait, rappelons-le, stupéfié toute la planète, peine à concrétiser ses promesses de campagne, notamment la plus emblématique, l’abrogation pure et dure de l’Obamacare, la loi sur l’assurance santé de Barack Obama (qui reste d’ailleurs la seule mesure emblématique des deux pauvres mandats du président démocrate). Cette promesse d’abrogation s’est heurtée aux divisions de sa majorité républicaine au Congrès. Le financement d’un mur frontalier avec le Mexique, promis à maintes reprises par Donald Trump, a dû être retiré ces jours derniers du projet fédéral de loi de finances pour éviter une crise budgétaire et une paralysie des services gouvernementaux. Quant à la fameuse grande réforme fiscale de l’ancien candidat républicain, mesure phare de son programme économique, dévoilée à la hâte il y a quelques jours pour redorer justement le bilan de ces 100 premiers jours, elle a été largement perçue par les Américains comme un cadeau de plusieurs milliards de dollars aux plus riches et ne fera certainement qu’alourdir la dette du pays.

Même si dans une allocution vidéo destinée au peuple américain, D. Trump déclare que « les 100 premiers jours de mon administration ont tout simplement été les plus couronnés de succès de toute l’histoire de notre pays » (ce qui signifierait que les 44 précédents présidents n’auraient pratiquement rien fait durant leurs 100 premiers jours de présidence respective, cela ressemble beaucoup à la vieille méthode Couet), difficile de ne pas résumer ce début de mandat à la seule véritable et symbolique mesure prise, le fameux décret présidentiel visant à interdire l’entrée de ressortissants de plusieurs pays à majorité musulmane ; un décret qui par ailleurs a été bloqué et rejeté par deux fois par la justice américaine. Faut-il voir dans ce blocage l’inexpérience manifeste de son administration ou, au fond, la nature même d’un système figé et irrémédiable ? En d’autres termes, le système serait-il résistant à toute gouvernance, serait-il même au-dessus de toute puissance ? Y aurait-il un système dans le système qui empêcherait tout réel changement, fut-il l’expression ultime du peuple… ? On l’a vu, dès son arrivée à la Maison Blanche, D. Trump a dû affronter, au sein même de sa propre administration, des assauts pour le moins inattendus (notamment de la part des nombreuses agences de renseignements).

Et comme souvent, les prises de position les plus retentissantes du gouvernement américain ne concernent pas tant la politique intérieure du pays que celle destinée, à l’extérieur, à affirmer la puissance de l’Oncle Sam. Ainsi, D. Trump, contrairement à ses engagements de campagne, a-t-il engagé les forces américaines en Syrie, pour un résultat bien plus que mitigé, et entretenu un climat de tension extrême (avec l’envoi d’une flotte militaire dans une zone plus que périlleuse) avec la Corée du Nord, dont personne n’en mesure pleinement les conséquences. On notera enfin, au crédit de ces 100 premiers jours de présidence Trump, plusieurs décrets pour renverser les mesures de la présidence de B. Obama sur l’industrie, l’environnement ou la limitation des forages pétroliers. Des efforts salués par toute l’industrie pétrolière et minière américaine…

On s’aperçoit ainsi que, même le plus farfelu des présidents (convenons que D. Trump figure au sommet de cette liste virtuelle, ce même président censé détenir la plupart des pouvoirs exécutifs et politiques, les Républicains détiennent la majorité au Congrès) n’a au fond qu’une marge de manœuvre relative. On nous annonçait une tempête, un ouragan ou une tornade, au pire, n’avons-nous eu qu’un petit coup de vent. Est-ce un bien ou plutôt un mal pour nos démocraties ? On peut légitimement se poser la question mais cet état de fait permettra de relativiser l’étendue du champ d’action de notre nouveau(elle) président(e) de la République française.