Grande comédienne, on l’a vu jouer sous la direction notamment de François Rancillac (« Le pays lointain ») ou d’Antoine Caubet (« Le Roi Lear »), Christine Guênon s’est faufilée au cœur des huit cents pages de cet immense roman d’aventures politico-philosophiques, « L’homme qui rit », signé Victor Hugo bien évidemment, pour suivre à la trace nos héros au fil de leurs pérégrinations. La comédienne a avec elle une chaise, un banc, une table de maquillage mais surtout la plume inoxydable du grand Victor, génial conteur de la misère humaine, infatigable militant d’une démocratie réelle qui considérerait enfin les plus démunis (l’étranger, le pauvre, le bagnard et les enfants) comme la pierre de touche de nos sociétés.

Dans l’Angleterre de la fin du XVIIe siècle sévissent les Comprachicos, des hommes qui achètent des enfants pour les revendre après en avoir fait des bêtes de foire. Ils ont ainsi enlevé Gwynplaine, qu’ils ont atrocement mutilé, lui imprimant sur le visage un rictus éternel en lui fendant la bouche. Vers la fin d’une des plus glaciales journées de janvier 1690, ils abandonnent l’enfant dénué de tout dans une dangereuse crique. Seul, bravant la tempête, il trouve dans la neige une petite fille, Déa, rendue aveugle par le froid, qu’il emporte avec lui. Recueillis par Ursus, un bateleur misanthrope, ils formeront bien vite une famille, un groupe nomade, et Gwynplaine deviendra le célèbre « Homme qui rit », vedette incontestée des foires de la vieille Angleterre. Jusqu’au jour où la Chambre des lords le réclame… Qu’est-ce que rire d’un rire ? Si c’était la seule réponse possible à la violence cynique du pouvoir…

La Buire – L’Horme – 16 janvier