la culture est une source inépuisable et Chacun peut y étancher sa soif de découverte, d’émotions, d’éveil, mais aussi, et c’est une bonne nouvelle, militer, dénoncer, réfléchir, s’engager, penser le monde autrement. Depuis quelques années, des tiers lieux émergent, et en leur sein des acteurs culturels atypiques. Ils souhaitent proposer un nouveau modèle sur lequel s’appuyer. Proche des gens, proche de valeurs humanistes, collaboratives, en coconstruction permanente, ces lieux sont à notre échelle, accessibles et inspirants. Rencontre avec Jérémie Guignand, coordinateur de La Laverie, qui nous raconte l’histoire de cette laverie pas comme les autres !

De quelle(s) envie(s) est née La laverie ?

La Laverie est née de la rencontre de plusieurs personnes qui avaient pour point commun de fréquenter les festivals d’arts de la rue en tant qu’artistes ou en tant que spectateurs passionnés. Nous constations que les évènements autour des arts de la rue étaient très rares à Saint-Étienne alors même qu’on croisait plein de copains et de copines stéphanois·e·s dans les festivals. Alors, on s’est dit qu’on allait inverser la tendance ! D’abord en transformant une ancienne laverie industrielle du quartier Chateaucreux en une salle de spectacle éphémère en 2016. On s’y est fait la main en organisant 8 évènements en 6 mois avant de sortir dans la rue, notre terrain de prédilection, en 2017.

Quel est votre objectif ?

L’idée de La Laverie c’est de créer des évènements originaux dans l’espace public un peu partout dans la ville. On cherche à faire en sorte qu’ils soient accessibles à une majorité de gens en favorisant le prix libre. On cherche aussi à investir des lieux du quotidien pour réenchanter la ville… Et même parfois en bas de chez soi ! Par exemple, en 2017, on a organisé « L’Avent par les fenêtres » un calendrier de l’Avent vivant et itinérant dans les quartiers Carnot et Jacquard. Entre le 1er et le 24 décembre, le public était invité chaque soir à une adresse différente. À 19 heures pétantes, une fenêtre de l’appartement ou de la maison d’un·e des habitant·e·s du quartier s’ouvrait et laissait la place à un spectacle original de 12 minutes joué pour le public qui était dans la rue. Il y a eu entre 100 et 300 personnes par soir et il y a eu pas mal de gens qui sont tombés par hasard sur un spectacle en rentrant chez eux et sont revenus le lendemain. C’est une des forces des arts de la rue de toucher des gens de manière inattendue !

Comment fonctionnez-vous ?

Il y a un groupe de 8 personnes qui se réunit régulièrement pour suivre le projet de La Laverie. Et une quarantaine de bénévoles gravite autour de La Laverie pour s’impliquer dans les évènements en fonction des disponibilités, envies et motivations. Cela permet de valoriser les créativités de chacun et chacune pour donner vie à des propositions parfois décalées, toujours surprenantes ! Par exemple, pour la Coconut Party qui a eu lieu le 23 juin, Marie, une des bénévoles, a animé un atelier de créations de marionnettes géantes d’animaux tropicaux pour les enfants à la Médiathèque Carnot. Chaque évènement est aussi pour nous l’occasion de travailler en partenariat avec différentes structures stéphanoises afin de créer des ponts entre de multiples activités et de rencontrer les gens des quartiers où l’on vient organiser un évènement.

Quels types de créations proposez-vous ?

Pour nous, l’idée, c’est de pouvoir faire découvrir au public stéphanois des spectacles que l’on a vu dans différents festivals et qui nous ont touchés. Ensuite, en fonction des spectacles, on construit un évènement qui va associer une scénographie, d’autres spectacles ou concerts, des animations et toutes les idées folles qui nous passent par la tête à ce moment-là ! Par exemple, on a construit un évènement qui s’appelait « Tout doit disparaître » autour de deux spectacles d’arts de la rue qui ont un côté « vieux objets » : Les Frères Jacquard et Ma vie de grenier. En parallèle, sur la place devant l’Ancienne Comédie, on a organisé des jeux forains de récup’ (lancer de napperons sur télévision, course de déambulateurs), proposé un concours de bonimenteurs ouvert à tout le monde et aménagé tout un salon de grand-mère avec l’aide d’Emmaüs et Chrysalide ! Des gens du quartier sont venus se poser sur les canapés pour boire un coup et ont découvert les spectacles qu’on proposait.

Ce qui nous intéresse dans ce genre d’évènements c’est que le public ait l’impression de voyager dans sa propre ville ! On accueille aussi des compagnies professionnelles des arts de la rue en résidence. Généralement un spectacle met deux ans à être créé, durée pendant laquelle les compagnies se retrouvent en résidence de création pour faire construire une étape de leur création. En fonction des spectacles et de leur avancée, les besoins ne sont pas les mêmes. Il faut trouver des lieux adaptés à chaque compagnie : dans un théâtre, dans l’espace public ou même chez l’habitant !

Vous qualifieriez votre programmation et votre état d’esprit comme engagée, de la « contre-culture » ou une forme moins institutionnelle (tiers lieu) de la culture ?

Nous pensons que le plus important, c’est de proposer des choses qui ne se font pas ailleurs. C’est pour cela que l’on investit des lieux qui ne sont pas dédiés à la culture, le plus souvent dans l’espace public. La ville de Saint-Étienne a décidé de nous conventionner au titre de l’émergence et nous sommes soutenus par la DRAC Auvergne-Rhône-Alpes ainsi que par d’autres partenaires institutionnels en fonction des projets. C’est une forme de reconnaissance et ça nous donne aussi la possibilité de payer à leur juste valeur des compagnies professionnelles tout en proposant leurs spectacles à prix libre. On aime mixer les publics et pour cela tisser des liens avec des acteurs différents de la vie culturelle stéphanoise déjà foisonnante ! Par exemple, avec l’association Avataria, on a organisé un évènement autour du spectacle Les Tondues de la compagnie Les Arts Oseurs. Pendant une semaine, on a réussi à réunir sur un même programme des structures issues de divers horizons : le cinéma Le Méliès, le Remue-Méninges, la Médiathèque, la Cinémathèque, la Gueule Noire, la Maison de Quartier du Soleil, Radio Dio, le Mémorial de la Résistance et de la Déportation…

le dernier mot c’est vous qui décidez 😉

Venez voir par vous-même ! Du 1er au 7 juillet, on propose l’intégrale de « La Ville en Mythorama ». C’est un programme de 10 balades décalées dans 10 quartiers différents où l’on suivra Julien Tauber, conteur mythomane, qui vous fera redécouvrir Saint-Étienne en y implantant des histoires de la mythologie grecque. C’est une proposition très surprenante qui s’appuie sur plein d’éléments de la ville pour la raconter différemment et stimuler l’imagination.

Fin septembre, on vous proposera un évènement de 3 jours au Parc Couriot autour de l’univers des cirques forains à l’ancienne… Tenez-vous au courant !