Petit à petit, le festival Ciné Court Animé de Roanne fait son nid. Cette neuvième édition riche en découvertes et promesses devrait assoir encore plus ce festival qui a su se faire une très belle place dans l’ombre d’un géant. Rencontre avec son organisateur Loïc Portier :

Comment est né ce festival ?

En fait, je travaillais sur d’importants festivals de cinéma en Espagne depuis quelques années et je m’étais spécialisé dans le cinéma d’animation en format court. J’ai commencé à écrire un projet de festival de ciné court animé et je l’ai ensuite proposé à la Ville de Roanne d’où je suis originaire. Je me disais qu’il était possible sur une ville de taille moyenne comme Roanne de créer un évènement assez important dédié au cinéma d’animation et j’avais l’envie d’en faire profiter mon territoire d’origine. La question était de savoir si Ciné court animé allait trouver son public étant donné qu’il s’agit d’un festival d’animation pour le public adulte et adolescent. La sauce a très vite pris dès la première édition et nous avons donc décidé de continuer l’expérience… et la fréquentation n’a cessé de progresser.

Pouvez-vous nous donner quelques chiffres (fréquentations, nombre de prix, nombre de courts-métrages présentés, budgets…) autour de ce festival ?

En 2017, le festival a touché plus de 12 400 spectateurs provenant en majorité de notre territoire mais nous attirons aussi un public de toute la France (public provenant de plus de 25 départements français en 2017).

Nous présenterons cette année plus de 200 courts d’animation issus de 40 pays, 70 heures de projections seront proposées ainsi que 4 expositions, une vingtaine de conférences et de multiples rencontres avec des réalisateurs.

Comment se déroulent les sélections des films ?

Les films peuvent être inscrits via notre page web mais la majorité des films sélectionnés sont le résultat d’un long processus de repérage de films provenant du monde entier. Je regarde plus de 1 200 courts par an et ne cesse de demander des films à l’année afin de ne pas rater des pépites. L’idée est aussi de proposer un véritable panorama mondial et donc il faut aussi suivre des projets provenant de pays émergent notamment en Amérique du Sud ou encore dans les pays asiatiques où l’animation ne cesse de se développer. Il est désormais plus simple de demander tous ces films grâce à internet. Je me souviens de mes débuts en Espagne où nous recevions uniquement des DVD voir vhs…

Quel est le public qui assiste au festival ?

Nous avons un public véritablement de tous âges. Il faut savoir qu’il ne s’agit pas d’un festival jeune public, donc la tranche d’âge la plus touchée se situe entre 20 et 50 ans…

Nous proposons tout de même de nombreuses séances scolaires pour permettre aussi aux plus jeunes de découvrir des contenus adaptés.

La France possède une véritable filière de création autour de l’animation. Comment expliquer ce savoir-faire ?

On peut l’expliquer par le fait qu’il existe de très nombreuses écoles d’animation en France reconnues mondialement. Les premières écoles ont été créées dans les années 80 et ont prit le parti de former à la fois des auteurs mais aussi des techniciens. L’animation made in France est effectivement très sollicitée à l’étranger par les plus grands studios. Des élèves à peine sortis d’écoles peuvent rapidement être recrutés par des studios tels que Pixar, Dreamworks…

Par ailleurs, nous disposons d’une compétition nationale depuis les débuts du festival qui met en avant les créateurs français car cela semblait fondamental au vu de la richesse et de la diversité de la production française dans ce domaine. La France est l’un des plus gros producteurs de courts-métrages d’animation au monde.

Le Festival décerne de nombreux prix. Est-ce indispensable ?

Il me semble que c’est important de disposer de compétitions mettant en avant les talents actuels de l’animation. Ces prix peuvent aussi leur permettre de réinvestir dans leurs futurs projets (s’ils en gagnent beaucoup…).

Comment le festival se positionne-t-il par rapport à son voisin Auvergnat ?

Le festival de Clermont-Ferrand est un festival historique (40e édition cette année) et le plus important dédié au court-métrage au monde. C’est une manifestation incroyable qui a réussi à mettre en avant le format court et le rendre accessible à un large public. Nous n’avons pas du tout la même taille ni répercussion. J’ai personnellement découvert le court à Clermont-Ferrand qui est aussi un festival très populaire parvenant à réunir un public très important chaque année.

Concernant notre festival, notre objectif est surtout de proposer un important panorama mondial de l’animation en format court et fidéliser un public curieux de découvrir les pépites de ce cinéma créatif, ce que nous avons réussi à faire au fil des années.

Quelles seront les animations qui se dérouleront durant le festival ?

De très nombreuses animations, hors projections, seront proposées sur tout le territoire roannais durant plus d’un mois. Expositions sur le cinéma d’animation et ses multiples facettes, ateliers de découverte du cinéma d’animation, colloque international avec plus de 20 conférences, spectacles danse et arts numériques, concerts, rencontres avec des réalisateurs, ciné-concert…..seront au programme.

C’est la mairie de Roanne qui organise le festival. Un avantage ?

C’est effectivement la Ville de Roanne qui porte la manifestation. Il s’agit clairement d’un avantage car divers services de la Ville participent à l’organisation du festival. Je trouve personnellement qu’il est important que des collectivités s’engagent sur ce type de manifestation qui a d’importantes répercutions sur le territoire, touche un large public et crée une véritable dynamique avec des actions aussi à l’année. Le festival a clairement pu progresser au fil des années grâce à l’engagement de la Ville et ceci a permis à la manifestation d’avoir une envergure nationale et internationale au fil des éditions.

Le festival est international. Retrouve-t-on des spécificités par pays, lesquelles par exemple ?

Je dirai que les pays asiatiques comme le Japon ou la Chine proposent souvent une animation plus traditionnelle au niveau technique et très peu de films en 3D, à la différence du cinéma nord-américain par exemple. Mais il est difficile de généraliser car le court est bien souvent un format d’expérimentation. Par exemple, le long-métrage d’animation est bien souvent réalisé en 3D car ayant la volonté de toucher un public familial alors que dans le court ces « contraintes » n’existent pas donc de très nombreuses techniques existent.

Les festivals sont-ils soumis à la concurrence du numérique ou d’internet ?

Je ne crois pas car les festivals trouvent leur public qui se déplace pour découvrir un cinéma finalement peu diffusé hors festival. Et puis, un festival c’est aussi une ambiance, un lieu de rencontres, de découvertes, d’échanges…

Est-ce encore facile de trouver des financements pour ce type de manifestation ?

Je ne dirais pas que c’est facile car c’est aussi un important travail de longue haleine, mais nous sommes assez bien soutenus. Ciné court animé est soutenu par divers partenaires institutionnels tels que la Région Auvergne Rhône-Alpes, le Conseil Départemental de la Loire et la Drac Auvergne Rhône-Alpes. Et c’est très important d’avoir des partenaires qui nous soutiennent si nous voulons progresser et faire évoluer notre manifestation. Nous avons aussi des partenaires privés qui nous aident mais la question du mécénat est toujours assez compliquée…

Quels seront vos objectifs pour cette 9e édition ?

Mettre en avant la richesse de ce cinéma des plus créatifs, permettre à un large public d’accéder à ces contenus, de rencontrer les créateurs et créatrices afin d’échanger sur les films…. Et faire vivre la ville au rythme animé en proposant des programmations originales dans de très nombreux lieux (cinéma, musée, théâtre, médiathèque, université, hôpital…)

Et bien sûr, si l’on peut encore augmenter la fréquentation, ce sera la cerise sur le gâteau !