Il y a tout juste 15 jours, je remettais en cause un certain Martin Hirsch, directeur général des Hôpitaux de Paris dans l’affaire de cette jeune interne qui, sur internet, dénonçait le manque de moyen flagrant des urgences… Je pointais le parcours pour le moins alambiqué de Martin Hirsch, un cursus qui témoignait parfaitement de la dérive de nos élites dites intellectuelles. L’affaire François Fillon vient corroborer mon propos. Voilà donc un homme politique qui, il y a seulement deux ou trois semaines encore, était présenté comme très certainement le prochain Président de la République Française. Un homme de l’ombre, éternel second (sans doute y avait-il une raison…), au parcours universitaire brillant, certes moins remarquable que celui de M. Hirsch. Depuis 1976, soit 40 ans après son entrée dans la vie active, François Fillon vit au frais de la princesse, donc à nos frais. Comme son homologue François Hollande mais aussi Benoit Hamon au passage, Fr. Fillon n’a jamais fait autre chose que de la politique. Fr. Fillon a toujours fait de la politique, il a toujours vécu grâce à la politique. Et de quoi s’aperçoit-on aujourd’hui ? Que non seulement il a grassement vécu de son activité politique – Monsieur posait il y a encore quelques mois avec toute sa belle famille devant la très belle demeure familiale – mais il en a fait profiter largement toute sa famille, femme et enfants.

Sa seule défense à ce jour, face il est vrai à un véritable déferlement médiatique qu’il semble pourtant étonné de découvrir (a-t-il oublié les affaires Cahuzac ou Morelle ?) est non pas de démentir les différentes informations parues dans la presse mais de jurer haut et fort que ses pratiques de préférences familiales, par opposition à la préférence nationale avancée par la famille Le Pen, étaient tout à fait légales. Celui-là même qui prenait plaisir à citer le Général de Gaulle pour discréditer son principal concurrent à la course aux primaires de la Droite en se plaçant ainsi sur le plan de la morale, est donc pris à son propre jeu, celui justement de la morale. En effet, toute sa stratégie, gagnante jusqu’à présent, a été de mettre en avant sa moralité d’homme de valeurs, de foi et de probité. Or, que montrent ses révélations sinon qu’en termes de moralité, Fr. Fillon n’est pas plus exemplaire qu’une bonne partie de la classe politique Française ? Sans doute le temps est-il venu de remettre en cause l’ensemble des privilèges qui au sein de cette Ve République accompagne l’exercice politique. Sans doute le temps est-il venu de comprendre qu’une partie du déficit national se trouve dans les dorures et les palais de notre État, des voitures de fonction jusqu’aux retraites dorées, des placards en or jusqu’aux plus vieilles représentations de notre diplomatie, des indemnités représentatives de frais de mandat (sans aucun justificatif) jusqu’aux généreux traitements des anciens membres du gouvernement. Il faut que l’exercice de la politique, au niveau national ou local, ne confère plus ad vitam aeternam une rente confortable qui conduise à construire de vraies fortunes familiales, mais redevienne une vocation sacrificielle et temporelle au bénéfice de la nation.

La politique ne doit plus être l’ambition de toute une carrière mais bien une parenthèse durant laquelle le citoyen donne plus qu’il ne reçoit. Le seul moyen d’arriver à un exercice moral de la politique est de rendre comptable tout homme politique, en terme juridique, de son action et des conséquences des décisions qu’il devra assumer pleinement. On mesure bien l’ardeur qui anime la plupart des candidats à l’élection présidentielle. Mais cette élection présidentielle ne doit plus être l’arbre qui cache la forêt. C’est bien l’ensemble de notre système politique qui favorise l’enrichissement personnel et le népotisme. Comment peut-on encore admettre, par exemple, que le couple Balkany siège à l’Assemblée ou à la mairie de Levallois-Perret ?

Ce n’est certainement pas un hasard si le budget du ministère de la justice soit aussi indécent. Ce n’est certainement pas un hasard si toutes ces affaires politiques mettent des années et des années à sortir, et plus grave encore, à être jugées. Les exemples se ramassent à la pelle. Mais pour reprendre celui du couple Balkany, notre démocratie montre aussi ses limites puisque Patrick comme Isabelle sont, à chaque élection, régulièrement réélus. Ce qui laisse à penser qu’au fond, nous avons bien la classe politique que nous méritons, non ? Nous passons notre temps, nous autres Français, à donner des brevets de moralité au monde entier, à ériger, toutes les cinq minutes la charte des droits de l’homme, nous hurlons au nom de la laïcité, de l’égalité, de la fraternité, mais ne serait-il pas temps de balayer devant notre porte ?